La Radio Logicielle

L’ordinateur tient maintenant une place de plus en plus importante au sein de la plupart des stations radioamateur. Auxiliaire précieux, permettant aussi bien de gérer le carnet de trafic, les qsls, et décoder les modes digitaux. Mais je ne vous apprends rien.

Pourquoi ne pas aller plus loin dans l’intégration, en transformant l’ordinateur en récepteur de trafic (ou transceiver) ultra-performant.

C’est de la partie réception dont je vais vous parler.

Cela s’appelle S.D.R. comme Software Défined Radio, dans la langue de cinq spires, ou Radio Logicielle, dans la langue de mots lierre.(boff !)

Le récepteur n’est plus qu’un convertisseur qui transforme le signal HF à recevoir, en signal BF compatible avec votre carte son.

C’est ensuite le logiciel qui fait le reste :amplification, démodulation tous modes , vision panoramique de l’activité sur la bande, bande passante variable, réducteur de bruit, noise blanker, filtre notch, filtre télégraphie.

La SDR ajoute une dimension visuelle à votre réception. Vous visualisez l’activité sur la bande, comme un récepteur panoramique..

Les possibilités d’enregistrement sont également inédites. Il est possible d’enregistrer toute l’activité de la bande à un moment donné. C’est vraiment bluffant !

C’est la qualité de votre carte son qui déterminera la qualité des résultats.

Au niveau de l’ordinateur, il faut au minimum un processeur à 1 giga et 1 giga de mémoire.

Vous allez dire que ça va encore coûter un bras. Eh bien non, en tout cas, pas forcément. Vous allez voir qu’on peut arriver à des performances haut de gamme, pour un prix très inférieur à un récepteur classique de niveau équivalent.

Je vous mets cependant en garde, certains professionnels mettent en avant les performances élevées, pour vendre leur matos à des prix délirants, quand on sait ce qu’il y a dedans !

Je ne vais pas vous faire un cours sur les techniques employées, tout cela se trouve déjà sur le web, je ferai juste un récapitulatif des grandes lignes, et surtout, je vous ferai part de mon expérience personnelle, ce qui pourra éventuellement vous guider dans votre choix.

Comment je suis venu à la radio logicielle :

Je voulais construire un bon récepteur de trafic décamétrique.

J’ai trouvé chez Elektor les schémas d’un récepteur très complet et très moderne, piloté par un dds (vfo digital). Il s’agit du Shortwave Catcher, décrit dans le numéro d’octobre 2006.

J’ai donc construit ce récepteur . Il comporte une sortie spéciale pour attaquer la carte son d’un ordinateur pour décoder la DRM ( digitale radio mondiale).

Il s’agit de stations de radio broadcast transmettant en numérique sur ondes courtes, avec une qualité de son digne de la FM.

Comment recevoir la DRM :

En partant d’un récepteur d’architecture classique, il s’agit de transformer la fréquence intermédiaire (455 khz par exemple) en fréquence compatible avec une carte son, et respectant la norme de la DRM, soit centrée sur 12 khz, avec une bande passante de 10 khz.

Pour une Fi de 455 khz, c’est très facile. On a besoin d’un oscillateur sur 455 +12 ou 455-12.

Il existe des résonateurs céramique sur 470khz très courants et pas chers. 455+12, ça fait 467. On met une petite capa en parallèle sur le résonateur, pour le faire osciller sur environ 467 khz. Un excellent circuit pour ce montage, est le NE612. C’est un oscillateur mélangeur, juste ce qu’il nous faut.

Il faudra prélever le signal 455 khz avant les filtres, et utiliser un filtre céramique de 12 ou 15 khz de bande passante.

On utilisera le logiciel Dream pour le décodage,  il est gratuit.

On peut donc, à peu de frais, moderniser un ancien récepteur.

Ce genre de montage donne accès à la réception logicielle et à presque tous ses avantages, mais ne permet pas la vision panoramique. Par contre une entrée mono suffit sur la carte son.

Sur l’image ci-dessous, vous pouvez voir la représentation typique de la bande passante d’une émission DRM.

On voit bien la bande passante centrée sur 12 khz et d’une largeur de 10 khz.

J’aurais aimé vous mettre un fichier son pour vous faire apprécier la qualité, mais c’est trop volumineux.

Dream peut aussi décoder l’AM, la FM la BLU et la CW, mais ne posséde pas toutes les possibilités offertes par d’autres programmes. Mais c’est le logiciel à utiliser pour la DRM.

Continuant à m’informer sur le web, j’ai rencontré le terme SDR IQ.

I pour In phase, et Q pour quadrature.

Un récepteur SDR IQ se comporte comme un récepteur à conversion directe, ou le signal à recevoir est directement converti en signal basse fréquence.

Le gros problème de ce genre de montage est la fréquence image. Un changement de fréquence produit toujours deux fréquences, une par addition, et l’autre par soustraction. Une des deux est indésirable, elle est nommée fréquence image. Dans un récepteur classique, elle est éliminée par des filtres, à l’entrée du récepteur. Mais ici, étant donnée la faible valeur de la FI, elle tombe dans la bande passante, et ne peut pas être éliminée de manière classique. On recourt à la méthode du phasing. Pour cela l’oscillateur local doit être le quadruple de la fréquence à recevoir, par exemple 28 MHz pour recevoir le 7 mhz.

Cet oscillateur local peut être un quartz ou un  oscillateur variable (vfo).

Le signal issu de cet oscillateur, attaque une double bascule flip-flop, (74ac74 par exemple) qui divise la fréquence par quatre, et il en sort deux signaux déphasés de 90 degrès.

Ces signaux sont mélangés au signal d’antenne par un mélangeur analogique (74hc4053,74hc4066…). Il en résulte un double signal basse fréquence déphasé toujours de 90 degrés, qui est amplifié par des amplis Op à faible bruit, et tout cela attaque les deux canaux de la carte son ( entrée stéréo obligatoire). C’est le logiciel qui se chargera de la réjection de la fréquence image. Il va de soi que les deux voies doivent être parfaitement équilibrées.

A la réception, on se retrouve avec une fréquence centrale qui est le quart de la fréquence de l’oscillateur, et on peut balayer en dessous et au dessus de cette fréquence. L’excursion de fréquence possible dépend de la fréquence d’échantillonnage de votre carte son. Par exemple, avec une fréquence de 48 khz, on pourra écouter 24 khz en dessous et 24 khz au dessus.

Les fréquences courantes d’échantillonnage sont 48,96,ou 192 khz.

Imaginez : si vous avez la chance de posséder une carte son qui ‘monte’ à 192 khz, vous vous centrez par exemple sur 7100 et vous pouvez visualiser la quasi intégralité du trafic de la bande des 7 mhz.

Si votre carte son n’est pas à la hauteur, il vous reste à utiliser une carte extérieure, sur un port USB par exemple.

Parlons maintenant matériel :

Si vous voulez avoir un panorama de ce qui existe, je vous conseille la page de f4dan.free.fr

Dans un premier temps, avant d’envisager une réalisation personnelle, et voulant tout de suite avoir quelque chose qui fonctionne bien, et ne pas mettre trop cher, je me suis payé le  récepteur en kit, PMSDR, de IW3AUT. J’ ai aussi acheté une carte son EMU TRACKER extérieure sur port USB.Pour info, ce matériel est distribué en France par RFHAM.COM.

Ajout 2019 = RFHAM est fermé.Je vous conseille de vous reporter directement au site de IW3AUT.

Il s’agit d’un semi-kit. Tous les composants cms sont déjà montés.Il reste à mettre les connecteurs, le quartz, un transfo et quelques bricoles. Aucune difficulté d’assemblage. Vous pouvez aussi ajouter un afficheur, et aussi le boîtier percé et sérigraphié.

Ci-dessous, l’ensemble PMSDR et la carte son EMU-Tracker.

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Il n’y a rien à redire, l’ensemble fonctionne vraiment bien et donne toute satisfaction.

Il est fourni avec un cd qui contient les logiciels et les dlls nécessaires.

Mon software préféré s’appelle HDSDR. (gratuit). C’est une déclinaison du programme Winrad, mais plus complet, avec notamment un superbe filtre notch, que je vous laisse découvrir.

Bien que pleinement satisfait de mon acquisition, j’ai voulu voir ce qu’on pouvait réaliser soi-même, avec des composants courants et à peu de frais , tout en gardant des performances correctes.

J’ai d’abord trouvé le Zeta-SDR. Trois circuits intégrés à 50 cents, un oscillateur quartz à 3 Euros, quelques résistances et condensateurs. Difficile de faire plus simple, sauf peut-être le poste à galène !

Eh bien, ça fonctionne. J’ai amélioré les performances en remplaçant le hc4052 par un 4053 (attention, brochage différent, il faut modifier le cablage) et le LM358 par un NE5532 (aucune modif de cablage).Cet appareil a quand même un inconvénient lié à sa simplicité : la réjection de la fréquence image n’est que de 20 db, ce qui est insuffisant.

Je suis ensuite tombé sur la page de YU1LM/QRP.

On y trouve la description de plusieurs réalisations, la plupart avec des composants bon marché. J’ai choisi la version DR2-2.

Attention : elle nécessite une alimentation en 12volts, et l’oscillateur local sera extérieur, quartz ou vfo.

Cette fois-ci, les résultats sont tout à fait satisfaisants. La réjection de la fréquence image dépasse les 45db, et la sensibilité est correcte.

Je conseille vraiment ce montage pour celui qui veut découvrir la SDR sans investir beaucoup de qsj.

Vous trouverez sur la page de YU1LM un ficier pdf avec toutes les infos, y compris le circuit imprimé. Pour ceux que la fabrication d’un circuit imprimé rebute, il doit être possible d’utiliser une plaque d’essais perforée.

Un filtre de bande à l’entrée peut être utile, mais pas toujours nécessaire, ça dépendra de votre antenne et des perturbations locales éventuelles.

Voyons maintenant la question de l’oscillateur local.

Vous savez déjà que l’oscillateur doit être d’une fréquence 4 fois supérieure à la fréquence désirée. Le quartz représente le plus simple, le plus stable, et le moins cher des oscillateurs. Il n’offre pas la souplesse d’utilisation d’un vfo. Mais c’est l’idéal pour les premières expérimentations. Un quartz de fréquence courante coûte environ 1 euro, un oscillateur à quartz 3 euros. Encore faut-il trouver les bonnes fréquences.

A titre d’infos, voici ce que j’ai trouvé dans le catalogue en ligne d’Electronique Diffusion, et les gammes couvertes, toujours en prenant en exemple une carte son avec un échantillonnage à 192k.

14.250 fréquence centrale 3.5625 couvre de 3.466 à 3.658

14.725 fréquence centrale 3.68125 couvre de 3.585 à 3.777

28.322 fréquence centrale 7.080 couvre de 6.984 à 7.176

28.375 fréquence centrale 7.093 couvre de 6.997 à 7.189

57.000 fréquence centrale 14.250 couvre de 14.154 à 14.346

85.000 fréquence centrale 21.250 couvre de 21.154 à 21.346

Rappel : certaines bandes décamétriques sont en ‘harmonique 2’ : 3.5,7,14,28 mhz.

Si on a un quartz qui couvre le 3.5 et qu’on double plusieurs fois sa fréquence, on couvrira plusieurs bandes. Je n’ai pas essayé mais ça devrait fonctionner.

Je n’ai pas encore réalisé de vfo spécifiquement conçu pour la SDR, cela fera peut-être le sujet d’un prochain article, si je poursuis dans cette voie.

N’oubliez pas qu’il doit monter jusqu’à 120 mhz, si vous voulez couvrir jusqu’à 30 mhz.

Je vais vous donner quelques pistes, vous trouverez des infos complémentaires sur le web.

Un dds qui va jusque 120 Mhz, ce n’est pas courant, mais ça existe.

Pour ma part, j’avais construit le générateur H.F. DDS vendu en kit par la société Comelec, et qui convient très bien à cette fonction. Mais il n’existe plus actuellement.

On doit pouvoir trouver d’autres dds sur le web.

Il y a d’autres solutions.

Très utilisé, l’oscillateur programmable SIS570

à voir aussi, CY27EE16, ICS307-2

Un multiplicateur de fréquence: ICS501

Une question qui m’a déjà été posée : ( je vous remercie de l’avoir posée ) j’utilise ma carte son pour décoder les modes digitaux, psk, sstv ou autre, comment faire si je l’utilise pour la SDR ?

Si vous utilisez la réception SDR, quand vous lancerez votre programme de décodage (multipsk par exemple) vous allez obtenir un message d’erreur, disant que votre carte son est utilisée par une autre application. Il y a deux remèdes à ce problème.

Soit vous utilisez une carte son externe pour la SDR, il suffit de brancher la sortie casque de la carte extérieure sur l’entrée ligne de la carte intégrée, et c’est celle-ci que vous utiliserez pour votre décodage des modes numériques.

Sinon, vous aurez besoin d’un petit logiciel appelé Virtual Audio Cable. Il crée des liaisons virtuelles entre les différents programmes. La configuration est très simple. Attention ce logiciel est payant (moins de 30 euros) mais vous pouvez télécharger une version d’évaluation. C’est même recommandé, pour voir si ça fonctionne bien chez vous.

Si je ne vous ai pas parlé de la partie émission, c’est que je ne l’ai pas expérimentée. Je ne parle que des choses que je connais. Peut être par la suite…

 Un champ d’expérimentation formidable s’ouvre à nous, c’est la vocation d’un ‘vrai’ radioamateur d’expérimenter.

A vos fers à souder !

Si vous possédez déjà une expérience en SDR, faites la nous partager (plus on est de fous…)

Ne vous y trompez pas , la SDR  est appelée à se développer de plus en plus. C’est même devenu un vrai engouement aux Etats Unis.

Pour approfondir le sujet, je peux vous citer le livre Construire une radio logicielle par DK7DJ, paru chez elektor.

Et pour vous faire une idée de ce que ça donne, vous pouvez essayer le web sdr.

73s à tous de bernard F6HSQ